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LENS 1918 : Le retour à Lens d’Alfred Bucquet

    Dans un article du journal La Voix du Nord du 3 octobre 1978, était retranscrit le texte dans lequel Alfred Bucquet avait relaté son voyage à Lens en 1918. Il fut l’un des tous premiers civils à passer une nuit dans les ruines de la cité.

   Alfred Buquet, instituteur pour les Mines de Lens à l’école de la cité Saint-Pierre, revient à Lens le 22 octobre 1918. Cela fait exactement 18 jours que les Allemands ont été chassés et que les troupes anglaises ont posé l’étendard de la liberté sur les ruines de la ville.

bucquet

   L’auteur de « Lens, son passé, ses houillères » raconte :

   « En permission à Saint-Hilaire Cottes dans ma famille, j’entreprends mon pèlerinage à Lens … Le train ne va pas plus loin que Bully. Par Grenay, j’arrive à pied là où se trouve un poteau indicateur «Saint-Pierre». Pour les Anglais, notre cité n’est ni Lens, ni Loos, ni Liévin mais Saint-Pierre.

001 gare bully

   Je continue à avancer. La route est entretenue par les Anglais pour leur ravitaillement. J’ai laissé à gauche la fosse 16. Il n’y a plus que la carcasse en fer et des tôles percées comme des écumoires. Les murs en briques sont abattus. Le carreau de la fosse est bouleversé par les tranchées et les trous d’obus. Du terril vers le 11, de la fumée : il brûle.

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    J’avance jusqu’à la maison du chef-porion et descend l’avenue derrière l’église puis vers l’école et la rue d’Artois jusqu’à l’avenue de la fosse. Les maisons sont toutes fortement touchées, bon nombre n’existent plus tels les écoles des filles, l’atelier de couture, la coopérative, les cabarets, la maison de l’ingénieur et de chef-porion, l’église et le presbytère et l’école des garçons.

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   La sixième classe, celle en bordure de l’avenue de la fosse, est debout à hauteur des murs, les autres classes n’ont plus que les fondations. Et encore ! Elle est remplie de pierres. Au milieu, un puits avec une échelle. J’y descends 8 à 10 mètres en m’éclairant avec mon briquet. Je me trouve dans une galerie qui aboutit à deux chambres souterraines masquées par des couvertures puis un deuxième puits par lequel je remonte. Je suis dans le jardin scolaire, il est transformé en cimetière allemand : 200, 300 tombes ?

004 cimetiere

   Je reviens vers ce qui fut ma maison, mon bureau, ma bibliothèque. Tout est rasé. La cave est devenue le rez-de-chaussée. On entre par le jardin scolaire. La pente du terrain a permis de faire la même chose avec la cave du presbytère : tout le chemin de croix est remisé dans l’escalier, un caveau est plein de bouteilles vides. Autour de l’église, il y a des tombes de civils tués par les bombardements en 1915. Mon jardin est dévasté, les murs de clôture abattus. Je ne retrouve rien des objets qui nous ont appartenu.

   Du carreau de la fosse 11, le sol apparait bouleversé, chaotique. Tranchées et boyaux, sapes et abris, blockhaus bétonnés, chevaux de frise, barbelés s’enchevêtrent à perte de vue parmi les milliers de trous d’obus. De-ci de-là, quelques squelettes d’avions, des cadavres de chevaux, des véhicules brisés, de menus objets hétéroclites, pauvres choses de la vie des tranchées.

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   La cote 70 rendue célèbre par les communiqués anglais est bouleversée par d’immenses cratères. Je continue vers Lens par le Chemin Manot et la route de Béthune. La fosse 12, le puits 12bis, l’hôpital (des mines) : rien ne reste que des carcasses en fer. L’eau ruisselle le long de la route de Béthune vers le fossé Sigier (cours d’eau artificiel qui reliait avant la guerre les fosses 3, 3 bis, 9, 12 et 1 des mines de Lens). Elle déborde de la fosse 12. Toutes les fosses sont donc noyées puisqu’elles communiquaient entre-elles.

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   Je descends la rue Bollaert jusqu’au boulevard des Ecoles (Bd Basly aujourd’hui). J’arrive à l’église Saint-Léger qui n’est plus qu’une grosse motte de débris d’où émergent quelques colonnes brisées. J’y grimpe, je n’aperçois que ruines ! La ville n’est plus qu’un amas informe de gravats ; aucun pas de mur ne domine.

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   Les rues ont disparu … Rue Bollaert, Boulevard des Ecoles, Rues de Lille et de Douai : plus d’arbres. La plaine de Lens a bien la forme d’une cuvette ; rien ne domine plus assez pour en rompre le dessin.

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   Le soir est venu. Où loger ? J’ai vu des gendarmes anglais près de la brasserie Shinckel, rue Decrombecque. J’y vais et les joins dans la cave. Ils m’indiquent dans la rue de la Porte d’Arras l’endroit aménagé pour les relais. Je m’y installe mais suis bientôt délogé par les rats. Je n’aime pas ce voisinage et préfère aller coucher au 11 où le cabinet du docteur m’a semblé plus confortable. Il pleut un peu mais bon …

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   Un groupe d’Anglais est logé dans la cave. J’adopte une des couchettes. Je suis un moment à m’endormir, il me semble entendre des souris. Quand je me réveille, il fait jour. Je parcours un peu la cité. Vers 10h00, je suis au passage à niveau de Loos en route vers Angres. Les voies ferrées sont restés mais il manque de nombreux rails.

   Depuis hier, je n’ai pas vu 10 civils. Je traverse le 3 de Lens (cité Saint-Amé à Liévin), descend dans Liévin et arrive à Angres. Des ruines, rien que des ruines, plus rien d’intact ! (…)

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   Je reprends la route, je traverse le cimetière, les tombes sont brisées, les cercueils sont ouverts, les ossement baignent dans l’eau de pluie. Je rejoins la route d’Arras à Béthune. La colline de Lorette est dévastée, la chapelle n’existe plus. C’est le bled avec d’innombrables trous d’obus et aussi des tombes de soldats.

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   Sitôt sur la grande route, je remarque que les champs ont été cultivés. Le contraste est poignant … Je suis resté là un long moment à regarder. Rien ne gène la vue. Je ne vois personne : aucun être vivant, que des oiseaux ! Sur les hauteurs à ma gauche se dressent les carcasses de la fosse 11 de Béthune (située à Grenay) et celles des fosses 16, 11, 12 et 14 de Lens. Plus loin, le 8 et les usines de Vendin. La cité Saint-Pierre retient mes regards avec ses squelettes de maisons alignées aux flancs de la côte 70.

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   Je repars par Aix-Noulette qui a bien souffert aussi. Je regagne la gare de Bully où j’ai un train pour Lillers. Je rentre à Saint-Hilaire à la nuit bien fatigué mais bien décidé à raconter en détail tout ce que j’ai vu. »

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A LENS IL Y A 100 ANS

Après 4 années d’occupation, les troupes allemandes décident de se retirer de Lens dans la nuit du 2 au 3 octobre 1918. Avant de partir, les occupants ont détruit tout ce qui pouvait encore l’être dans une ville déjà bien abimée par les tirs d’artillerie et les bombardements des armées alliées. Quand dans la nuit du 3 au 4 octobre 1918, les premiers soldats britanniques pénètrent dans ce qui était quatre ans plus tôt une ville prospère, il ne reste que des amas de ruines. Puits de mines, usines, immeubles, maisons individuelles, églises, écoles : tout est par terre, tout est au niveau du sol, tout est à reconstruire.

Un petit aperçu tout en images de ce qu’était Lens en 1914 et ce qu’elle est devenue quatre ans plus tard. (Cliquez sur l’image pour la voir en taille réelle).

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la Cité hollandaise de Lens-Loison

   A la fin de la Première Guerre Mondiale, les lensois reviennent en nombre dans leur ville. Ils veulent la reconstruire, la faire renaître de ses cendres. Aucune maison n’est habitable en 1919, les premières familles revenues vivent dans les caves. La Société des mines de Lens et la municipalité d’Emile Basly font édifier des logements pour les ouvriers affectés à la reconstruction et pour les familles lensoises de retour. Importés par l’armée américaine, ces habitations sont en forme de demi-lune en taule sans aucun confort même pour des lensois peu exigeants.

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   Au début de 1919, le gouvernement néerlandais, pays qui est resté neutre durant tout le conflit, crée une association « Retour au Foyer » et offre à la France trois millions de florins afin de reloger les populations sinistrées. Après la visite effectuée par les délégués de la conférence pour la Paix en avril, il a été décidé que cette somme serait affectée à l’édification de deux cités, l’une à Lens, l’autre à Liévin. Une société de construction est créée, elle a pour nom « Société anonyme franco-hollandaise d’Entreprise générale du bâtiment ». C’est l’ingénieur français Paul Dislère qui en est le président.

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   L’état néerlandais a également participé à l’édification de baraquements pour accueillir les services médicaux en remplacement de l’hospice de Lens détruit.

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   Une enquête d’utilité publique conclue au bien fondé de l’édification de 300 maisons en bois sur un territoire de près de seize hectares situé sur les communes de Lens et de Loison-sous-Lens du côté de la fosse 2, de part et d’autre de la route de Lille. L’État se désigne locataire des terrains (il les achètera aux propriétaires en 1926).

   Les maisons sont importées de Hollande en en pièces détachées. Elles proviennent de bâtiments utilisés pendant la Grande guerre dans les camps hollandais de Waschkolk à Nunspeet et du Vluchtoorp d’Uden où étaient hébergés des familles de réfugiés belges.

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  Les bâtiments, trop grands pour les besoins de la cité, ont été retaillés pour concevoir des petites maisons familiales. La mise en place et la construction sont assurées par des ouvriers français salariés de l’Etat dirigés par l’ingénieur hollandais Hendrik Sangster et son architecte Van den Harend qui réalisent les plans de la cité.

   Sangster sera secondé par son épouse Willy Warnaars dont les premières tâches seront de préparer les repas pour les ouvriers et d’assister les familles à emménager. Le couple habitera dans l’une des toutes premières maisons construites dans la cité et madame Sangster donnera à Lens, naissance à leur premier enfant le 4 juin 1921.

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   Dès l’été 1919, la construction peut commencer mais est rapidement arrêtée. Le 12 novembre 1919 à l’Assemblée Nationale Emile Basly, le maire de Lens qui habite lui-même dans une maison provisoire en bois, interpelle violemment Clémenceau, le président du conseil des ministres : « Le gouvernement hollandais avait décidé de construire à Lens 346 maisons provisoires. Les dispositions avaient été prises pour qu’elles soient construites pour l’hiver. Elles ne seront pas réalisées du fait qu’il est impossible au gouvernement d’affecter au chantier le nombre d’ouvriers nécessaire et d’acheminer les matériaux jusque Lens. Les promesses que vous avez faites à Lens ne peuvent rester lettre morte mais il est temps d’agir » et ajoute : « Le devoir qui s’impose à la France est de donner un abri suffisant à la population ouvrière que l’industrie attend ».

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   En 1920, les travaux reprennent et s’accélèrent. Les petites maisons poussent comme des champignons.

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   Au mois de novembre 1920, John Loudon, ambassadeur des Pays Bas à Paris vient se rendre compte lui-même de l’avancée des travaux. Près d’un an et demi plus tard, le 12 juin 1921, il remet officiellement à Emile Basly une cité pratiquement terminée où pourront être logées près de 2000 personnes.

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   Les maisons sont des baraquements en bois à double paroi entre lesquelles ont été maçonnées des briques. Elles possèdent des toits pentus faits de carton bitumé recouvert d’une épaisse couche de goudron. Devant chacune, un petit jardinet où les locataires cultiveront quelques légumes ou planteront des fleurs . D’ailleurs, Emile Basly comparent ces maisonnettes à celles construites par la France notamment dans la cité Chouard : « Contrairement aux maisons de la Cité hollandaise, il pleut dans toutes les pièces, il n’y a pas de cabinet d’aisance. Les abords de la cité sont recouverts de dépôts et de résidus ». Pourtant, les habitations de la cité hollandaise sont loin d’avoir tout le confort, il n’y a pas de raccordement au gaz ou à l’électricité et pas d’eau courante. Les habitants se fournissent à l’une des sept pompes installées dans les rues.

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   La cité hollandaise, ce n’est pas seulement ces habitations toutes peintes de couleurs vives cernées d’un petit jardinet destinées aux familles. Dix dortoirs pouvant héberger chacun 12 personnes sont réservés aux célibataires. On trouve également dans la cité trois écoles (garçons, filles et maternelles), une hôtellerie avec une grande salle des fêtes, dix chalets pour recevoir des commerces et en son centre, un coquet square de la Reine.

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   De plus, l’association néerlandaise « Retour au foyer » fournit aux familles qui emménagent mobilier et ustensiles de première nécessité : tables, chaises, lits, buffet, draps, batterie de cuisine …

   Ce 12 juin 1921 donc, la ville de Lens est en effervescence. De nombreuses personnalités sont présentes le jour de l’inauguration : Emile Basly, le maire de Lens, le commandant Fontana représentant M. Millerand, le secrétaire de la préfecture du Pas-de-Calais, le sous-préfet de Béthune, monsieur Stirn ainsi que Jules Lugol, sous-secrétaire d’Etat aux Régions Libérées.

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   John Loudon dit à ce dernier : « Je n’ai pas de clef à vous remettre comme dans les anciens temps mais j’ai le cœur de la Hollande à vous offrir ». Sur le banc du suare de la Reine, une plaque est découverte. On peut y lire : « 1919-1921. La Cité hollandaise fut érigée, pour les sinistrés de la Grande Guerre, par le royaume des Pays-Bas, avec le concours du gouvernement français ».

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   Après les discours et les toasts au cours desquels une nouvelle passe d’armes a lieu entre Basly et Lugol au sujet des autres habitations provisoires de la commune, les fillettes de l’école entonnent quelques airs avant que l’ambassadeur des Pays Bas ne leur face une distribution de bonbons.

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   Dans le Gauheria n°36, en août 1996, René Meurisse, un ancien habitant de la cité raconte : « Février 1922. Différentes boutiques ouvrent les unes après les autres : épicerie, boucherie, boulangerie, lingerie. Des artisans s’installent : menuisier, peintre, maçon, vitriers. On trouve même un rempailleur de chaises. Un cinéma et un estaminet complètent cet ensemble. Dans la plupart des foyers, le chef de famille est soit mineur à la fosse 2, soit ouvrier aux Tréfileries. Une véritable communauté se forme, des liens familiaux, professionnels ou de simple voisinage entretiennent une agréable convivialité. »

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   Mais très vite, cette cité tant louée par les autorités se dégrade : le gel fait exploser les canalisations et la moitié des pompes à eau est inutilisable, le goudron des toitures se fissure et laisse pénétrer l’eau dans les habitations, les peintures extérieures s’écaillent, les clôtures sont volées ou démontées par les locataires pour en faire du bois de chauffage. Les bains-douches, qui devaient être alimentés par une éolienne qui n’a jamais fonctionné, sont vandalisés, les baignoires sont dérobées. Ils finiront par être rasés sans n’avoir jamais servi.

   Au cours d’une séance du Conseil général le 29 septembre 1926, Emile Basly demande à l’Administration des Régions libérées qui perçoit les loyers des habitants de « prendre rapidement les mesures nécessaires à l’entretien des maisons, notamment en les faisant repeindre et de mettre en état de viabilité les rues en établissant un filet d’eau permettant l’écoulement des eaux pluviales et ménagères et en assurant de façon permanente l’entretien et le nettoyage des rues. »

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   En 1928, c’est le conseil municipal qui vote à l’unanimité l’envoi au préfet d’une lettre de protestation contre une substantielle augmentation des loyers décidée par l’Etat qui « n’a pas cru se conformer lui-même à la loi sur les lotissements ».

  En 1930, la cité est enfin alimentée en électricité. C’est la Compagnie la Saint-Quentinoise qui effectue le raccordement des maisons au réseau de 110 volts.

  Au début des années 1930, la municipalité conduite par Alfred Maës fait construire tout près de la Cité hollandaise l’école Emile Basly. Selon le maire de Lens, c’est une nécessité engendrée par « l’accroissement de la population consécutif à la construction de l’imposante Cité hollandaise où dans des écoles provisoires, les enfants étaient logés étroitement dans des locaux exigus manquant d’hygiène et de confort ».

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  Au printemps 1936, Paul Sion, conseiller général, déplore le manque de moyens de la part de l’Etat pour l’entretien de la Cité hollandaise : « Aucun crédit n’a été alloué pour l’entretien des chemins, réparation de pompes, des baraquements et l’enlèvement des ordures ménagères. De ce fait, les habitants de la cité vont se trouver dans une situation pitoyable l’hiver prochain ». Il demande à ce que la cité devienne propriété des communes qui en assureraient l’entretien. La ville de Loison-sous-Lens devient propriétaire de 9 hectares et 188 maisons pour 260 000 Francs et le bureau de bienfaisance de la ville de Lens d’un peu plus de 4 hectares et 173 habitations pour 280 000 Francs.

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   En octobre 1939, à l’emplacement des écoles détruites sont installés des abris afin que les habitants puissent se réfugier en cas de bombardements. En 1943, jugeant ces abris pas très sécurisants, les jeunes de la cité en creusèrent d’autres à 20 mètres de profondeur.

   De nombreux lensois habiteront ces logements « provisoires » pendant plus de quarante ans. En mars 1969, le conseil municipal d’André Delelis approuve le tracé de la rocade minière. Celle-ci passe au milieu de la cité hollandaise, pratiquement à la limite de Lens et de Loison-sous-Lens. Le 19 mars 1970, la ville de Lens autorise la vente des terrains au syndicat intercommunal gestionnaire de la construction de la rocade.

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  La cité est éventrée, ne reste sur le territoire de Lens que quelques maisons devenue masures, la ville décide de reloger les habitants dans des petites habitations modernes à peu de distance de là et crée la Résidence Anne Frank.

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  La Résidence Anne Frank est inaugurée le 15 avril 1970 en présence de monsieur Hoop-Scheffer, ambassadeur des Pays-Bas en France. En souvenir de la cité rasée, deux artères de la résidence Anne-Franck sont appelées « rue Rembrandt » et « rue de Rotterdam ».

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   Depuis cette époque, c’est à Loison-sous-Lens qu’il faut chercher ce qu’il reste de la cité hollandaise.

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  Aujourd’hui, quelques petites maisons rappellent un peu l’architecture de l’époque. Les rue d’Amsterdam, de la Couronne, du prince d’Orange, du ministre Loudon ou encore de Zuyderzee restent parmi les rares signes qui rappellent qu’il a près de 100 ans, le pays des tulipes est venu en aide aux sinistrés lensois.

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Il y a 100 ans à Lens, le 11 janvier 1917

(D’après le journal de Léon Tacquet « Dans la fournaise de Lens » paru dans le dossier de Gauheria n°7 en 2004).

   Revenons à Lens il y a 100 ans aujourd’hui, le 11 janvier 1917.

   Depuis 2 ans et 3 mois, Lens est occupé par les troupes allemandes. L’année 1917 sera-t-elle celle de la libération ? Les lensois en doutent : depuis 3 ans, la situation est figée. Malgré quelques offensives, les troupes allemandes ne se replient pas.

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   La population souffre des restrictions. Hier, le comité américain a remis des vivres aux habitants : 125 grammes de beurre (qui ressemble plus à de la graisse), 1 œuf pour 4 personnes, du pain de seigle et de froment. Les lensois fabriquent leur « pâté de guerre » : une mixture de riz, d’oignons, de thym et de saindoux !

   Chaque jour voit s’abattre sur la ville ces instruments de mort. La semaine dernière, 17 obus sont tombés dans le cimetière. Les monuments sont éventrés, les croix arrachées, des cercueils surnagent dans les caveaux inondés.

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   Le canal tout proche est obstrué de débris et encombré de carcasses de péniches abandonnées en toute hâte par les mariniers.

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  Lens est une ville fermée interdite aux étrangers, une ville de garnison. Les allemands ont reçu la semaine dernière des renforts venus de l’arrière. Pour les loger, ils ont réquisitionné des chambres chez l’habitant.

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  Le temps est gris, il fait froid, la température est tombée jusque moins 14°. Il ne se passe pas un jour sans qu’on entende le canon. Pourtant, en ce 11 janvier 1917, la ville semble calme, trop calme …. Pas un obus, pas un tir d’artillerie depuis deux jours. Vers 5 heures du soir, alors que la nuit tombe, des soldats allemands se regroupent et semblent vouloir se rendre sur le front.

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   Tout à coup, une avalanche d’obus ! Il en tombe en cascade jusque minuit. Les lensois sont terrés chez eux, ou dans ce qu’il reste du « chez eux », sans électricité, sans chauffage. Le peu de charbon qui restait dans les caves a été réquisitionné par les allemands, cette cave : le meilleur refuge.

  C’est le bombardement le plus puissant depuis le début de la guerre. Il tombera plus de 100 obus sur la ville. Par miracle, il n’y aura pas de victimes civiles. Chez les militaires allemands, on ne sait pas ! Les occupants ne communiquent jamais ce genre d’information.

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  Les troupes anglaises tirent de Calonne. Ils utilisent des obus à balles, des « shrapnel », qui en explosant envoient une multitude de projectiles sur l’objectif. De Loos, arrivent des obus énormes dont un seul peut écraser une maison entière. Il en tombe principalement entre le boulevard des Ecoles (boulevard Basly) et la mairie. Les grandes écoles ne sont plus que ruines.

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  Les obus atteignent l’église Saint Léger déjà bien mal en point et font s’écrouler un peu plus les pierres des murs. Rue du Wetz, il ne reste plus une maison debout. Rue de la Fonderie, il ne reste rien non plus du château Spriet.

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   Pas très loin, la gare n’est plus qu’un squelette de pierre et de bois.

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  Rue Diderot, les maisons voisines de celle d’Elie Reumaux ont reçu des « shrapnel » qui ont traversé les habitations du grenier au sous-sol, brisant tout sur leur passage. A l’hospice, cinq gros obus sont tombés sur les chambres quelques instants seulement après que les religieuses n’aient eu le temps de descendre les malades dans les caves. La moitié de l’hôpital est détruite. Un autre obus est tombé sur l’école privée de la rue de l’hospice éventrant toute le bâtiment et le réduisant à un tas de ruines.

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   La maison d’Ernest Cuvelette, rue de Douai (rue de Varsovie aujourd’hui) a également reçu un obus qui a laissé devant la porte un trou de 4,50 m de diamètre et de 3,5 mètres de profondeur. Les maisons voisines n’ont plus ni portes, ni fenêtres, ni toiture … Les rues du Chapitre (avenue Van Pelt) et Froissard sont jonchées de pierres, de bois, de débris provenant de ce qu’étaient encore hier des maisons. Le lendemain matin, des cris attirent les hommes qui déblaient : ils proviennent d’une dame réfugiée dans une cave qu’il faut extraire des décombres.

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  Les lensois nettoient, ramassent, réparent ce qui peut encore l’être, sauvent l’indispensable mais personne ne se plaint. Malgré leurs malheurs, ils applaudissent aux effets des bombardements, même s’ils en sont les victimes. Pour eux, ces obus qu’ils prennent sur la tête, qui détruisent leurs maisons, qui tuent leurs enfants sont signes d’une offensive donc d’un espoir prochain de libération.

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   Le lendemain, un communiqué anglais annoncera : « les positions allemandes ont été bombardées avec efficacité au nord-ouest de Lens ».

   A 5 heures, il n’y a plus âme qui vive dans les rues, le couvre-feu oblige les lensois à de nouveau se terrer pour la nuit. On apprend que les habitants de Liévin vont être évacués. Qu’en sera-t-il des lensois ?

  Il faudra encore subir les affres de la guerre pendant 3 mois avant que la ville de Lens ne soit à son tour vidée de ses habitants.

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Qui fut Marcelle Devred ?

   Marcelle Devred serait une jeune lensoise qui aurait été envoyée en déportation en 1914 où elle aurait subit la cruauté de ses geôliers allemands et été amputée d’une jambe à l’âge de 14 ans.

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   Après la guerre, elle devient chanteuse et entame une tournée dans toute la France. Elle interprète des airs de cette partition : ‘’Tour de France d’une petite martyre de guerre’’ parue aux éditions Dommel dans lesquels elle raconte en musique ses quatre années de captivité.

   Mais  il y a toujours eu des doutes sur la véracité de ses propos. Nulle part ailleurs, dans les écrits, dans les souvenirs de l’époque on ne trouve trace de ce drame. Aucune femme ou jeune fille de Lens n’a été déportée dès 1914. Selon les nombreux écrits de l’époque, seulement 300 civils du nord de la France choisis parmi les notables (hommes et femmes) n’ont été déportés en Allemagne qu’en novembre 1916. Après un accord signé entre les gouvernements français et allemand, ces otages sont rapatriés en 1917 en zone occupée.

   De plus, selon la page de couverture de cette partition, notre Marcelle serait née le 2 septembre 1902 à Lens. Or, dans les actes d’état civils de Lens du début du siècle, on ne trouve nulle part le nom de Devred (J’ai consulté les archives du Pas de Calais de 1898 à 1904).

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   Donc l’histoire d’une jeune femme incarcérée de 1914 à 1918 en Allemagne, martyrisée, volontairement amputée semble très peu vraisemblable.

   Cette partition est introuvable aujourd’hui. Je n’en ai trouvé que la couverture sur un site de ventes  en ligne.

   Étonnant pour un tel témoignage, non ?

   Alors récit véridique ou affabulation ? Le doute subsistera toujours.

1 Commentaire

A Lens, il y a 100 ans

   Il y a cent ans exactement, les lensois n’avaient certainement pas très envie de fêter la nouvelle année. Les bombardements incessants, les brimades des troupes allemandes, les difficultés de ravitaillement, les morts par dizaines ajoutés au temps glacial de ces premiers jours de janvier les obligeaient à vivre dans la peur, la faim et le froid.

   Alors, pour ne pas oublier ce qu’on vécu les lensois du début du 20ème siècle, voici une série de photographies de Lens aux alentours du 1er janvier 1916, il y a 100 ans …..

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Des troupes entières de prisonniers français sont emmenés vers l’arrière

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Le canal de Lens et les débris de péniches

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Les tranchées devant la fosse 11

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Les allemands installent une ‘grosse Bertha’ dans une usine

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Les habitations subissent les bombardements

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La rue de Lille

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La gare est inutilisable

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Des soldats allemands font constater les dégâts occasionnés par les bombardements français

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Les fanfares allemandes pavoisent dans les rues de Lens

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L’église Saint Léger

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Des soldats allemands dans les ruines d’une fosse

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L’église Saint Pierre de la cité 11

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Les carreaux de fosses sont abandonnés

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Ils seront finalement entièrement détruits

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La mairie en construction au début du conflit

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La rue Victor Hugo

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Des prisonniers français travaillent au déblaiement sous les ordres allemands

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La grande histoire du Monument Canadien de Vimy

   Aujourd’hui, nous quittons Lens. Oh ! Rassurez vous, nous n’allons pas loin : quelques kilomètres en direction d’Arras et nous ne pouvons rater sur notre droite cette construction originale composée de deux grandes colonnes.

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   Alors, profitons de ce magnifique site pour revenir sur la grande histoire du Monument Canadien de Vimy.

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   Lors de la première guerre mondiale, les troupes canadiennes arrivent en Europe dès décembre 1914 et servent dans le nord de la France et en Belgique. Elles participent notamment à la seconde bataille d’Ypres d’avril 1915 et à la bataille de la Somme d’avril-mai 1916. Du 9 au 12 avril 1917, après deux tentatives infructueuses des Alliés, les quatre divisions canadiennes, réunies pour la première fois au combat, réussirent à s’emparer de la crête de Vimy, une position densément fortifiée par les Allemands à 145 m d’altitude.

MC002     Avant même la fin de la guerre, les militaires canadiens ont érigé sur les sites de bataille des monuments à la mémoire des disparus. Le Monument commémoratif de l’Artillerie canadienne en est un exemple. Construit pendant l’hiver 1917-1918 et inauguré par le général Byng au printemps 1918, il se trouve au carrefour Les Tilleuls à Thélus.

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   L’idée du gouvernement canadien était que les monuments commémoratifs érigés sur des champs de bataille ne servent pas glorifier la guerre, mais plutôt exprimer le deuil et rendre hommage aux disparus qui avaient donné leur vie pour les vivants. Le nombre de morts canadiens durant la première guerre mondiale est de 60 000 parmi les 625 000 soldats. Environ 7 000 d’entre eux sont enterrés dans une trentaine de cimetières militaires situés dans le Pas-de-Calais.

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   Dès le mois de mai 1917, la commission impériale des sépultures de guerre (CISG) est créée et a pour but d’enterrer dignement les soldats morts au combat dans des cimetières permanents. Elle est aussi chargée de prévoir la façon dont on pourrait commémorer les morts et les disparus. Réunie à Londres en 1918, elle approuve la construction de cinq mémoriaux ouverts au public.

   En 1920, la “Canada Batlefields Memorial Commission” (Comité des monuments commémoratifs canadiens érigés sur des champs de bataille) organise un concours pour désigner les monuments canadiens qui seront érigés sur les différents sites des combats.

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   En octobre 1921, la CBMC adopte pour l’un de ces sites le projet de Walter Allward qui inclue vingt personnages symboliques associés à la guerre. Ceux-ci sont intégrés à un socle massif en pierre surmonté de deux immenses piliers représentant le Canada et la France. Son projet est présenté sous forme d’une maquette de plâtre.

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   En 1922, le gouvernement français octroie au Canada le libre usage à perpétuité d’une parcelle d’un hectare 71 située sur le terrain massacré des champs de bataille entre les communes de Vimy et de Givenchy-en-Gohelle. La CBMC décide que la crête de Vimy appelée aussi  ‘cote 145’ recevrait le monument d’Allward.

   La somme de 1,5 million de dollars investie dans cette construction est obtenue en grande partie par une souscription ouverte au Canada. La “Canada Batlefields Memorial Commission” a utilisé l’excédent de la souscription à la construction du temple protestant de la rue Victor Hugo à Lens.

   Le site de Vimy est le point culminant des collines de l’Artois et offre des vues imprenables sur le bassin minier dans un rayon de 35 kilomètres. Le monument est entouré aujourd’hui d’un parc de 110 hectares constitué d’une multitude d’arbres et d’arbustes importés du Canada et plantés chacun par un de ses ressortissants.

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   Selon bon nombre de gens, le monument commémoratif du Canada à Vimy est l’œuvre la plus remarquable de Walter Allward. Il y a consacré 14 ans de sa vie.

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   Au moment où il remporte le concours, Allward est un sculpteur déjà bien connu pour ses mémoriaux. Né à Toronto en 1875, il a suivi des cours de sculpture à la New Technical School de cette ville entre 1891 et 1893 et loué son premier atelier en 1894. En 1910, il sculpte le monument commémorant la participation du Canada à la guerre en Afrique du Sud. Il sculpte aussi des bustes et des statues de Canadiens célèbres comme celui de Brantford en l’honneur de Graham Bell, l’inventeur du téléphone.

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   En 1925, les travaux commencent. Peu à peu, à la pioche et à la pelle, le terrain est creusé, nettoyé des débris de la guerre et aplani. Il a fallu trois ans pour uniquement creuser les fondations et construire la plate-forme.

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   Allward  confectionne au Canada des statues de plâtre de taille réelle à l’aide de moules qu’il a lui-même créés. Il retouche ensuite les statues à la main.

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   Les œuvres de plâtre sont ensuite expédiées à Vimy pour être reproduites en pierre par des artisans locaux. De vastes hangars sont construits pour abriter les tailleurs de pierre et les sculpteurs.

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Sympathy of Canadians for the Helpless, Finishing touches, Octob

   II faudra onze mille tonnes de béton et de maçonnerie pour ériger la base du monument et cinq mille cinq cents tonnes de pierre, importée de l’île de Brač en Croatie, pour les pylônes et les sculptures.

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   Les blocs de pierre sont apportés sur le site par une ligne de chemin de fer à voie étroite dont une partie servit à l’approvisionnement des troupes en munitions pendant la guerre. Les wagonnets sont tirés par des chevaux.

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   Une fois taillés, les blocs sont hissés afin de confectionner les deux colonnes à l’aide de grues également conçues sur-place.

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   Quand les deux pylônes sont en place, ils sont enfermés dans un abri provisoire afin de protéger les sculpteurs travaillant en hauteur.

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   Ces deux pylônes représentent le Canada et la France et culminent 40 mètres au-dessus de la base du monument. Ils pèsent près de 6 000 tonnes et le socle plus de 10 000. La figure la plus élevée – l’allégorie de la paix – domine la plaine de Lens d’environ 140 mètres.

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   Sur le devant du monument, la statue d’une femme voilée, tournée vers l’est, vers l’aube d’un nouveau jour représente la jeune nation canadienne pleurant ses enfants tombés au combat.

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   Les sculptures au sommet des piliers représentent les vertus universelles que sont la foi, la justice, la paix, l’honneur, la charité, la vérité, la connaissance et l’espoir. Sur la face ouest du mémorial sont sculptées les figures d’un homme et d’une femme représentant les parents des soldats tombés.

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   Sur chacune des faces du monument ont été gravés au burin les noms des victimes des combats, 11 285 jeunes canadiens qui ont laissé leur vie en France lors des combats du 9 au 12 avril 1917.

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   Sur son socle, sont gravés dans la pierre, en français et en anglais, les mots suivants :
‘’À LA VAILLANCE DE SES FILS PENDANT LA GRANDE GUERRE, ET EN MÉMOIRE DE SES SOIXANTE  MILLE MORTS, LE PEUPLE CANADIEN A ÉLEVÉ CE MONUMENT’’.

   Le 26 juillet 1936 à 14 h 15, le monument est inauguré et la figure représentant le Canada dévoilée par le roi du Royaume Uni Édouard VIII en présence du président français Albert Lebrun et du ministre canadien de la Justice Ernest Lapointe. Une foule compacte de Canadiens, de Français et de Britanniques estimée à près de 100 000 personnes s’est rassemblée autour du mémorial.

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   Une fanfare militaire française et des gardes de la cavalerie algérienne, les spahis, montés sur des chevaux blancs, prennent position en face de la Garde royale canadienne de part et d’autre de la large allée qui mène les dignitaires à la terrasse sur laquelle est érigé le monument.

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   Parmi les milliers de gens rassemblés pour l’événement, plus de 3 000 anciens combattants venus en pèlerinage organisé par la Légion canadienne occupent fièrement la place d’honneur dans l’amphithéâtre, sous le regard des membres de leur famille installés sur les pentes.

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   A l’arrivée d’Edouard VIII, la Garde Royale Canadienne exécute le salut royal, et la musique entonne le ‘God Save the King’ puis le ‘Ô Canada’ pendant que le roi passe en revue les militaires avant de descendre vers le tombeau.

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   Le roi accueille ensuite le président Lebrun alors que les fanfares entament La Marseillaise.

Chacun prononce alors un discours radiodiffusé dans le monde entier et dans lequel ils appellent à la paix dans le monde.

Après son discours, Edouard VIII procède au dévoilement du monument, tandis que les troupes se mettent au garde-à-vous. La sonnerie aux morts se fait alors entendre et est aussitôt suivie d’un moment de silence.

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   Deux escadrons de l’Aviation royale du Canada survolent alors le monument à basse altitude dans un bruit assourdissant, les pilotes saluent les autorités par quelques figures acrobatiques.

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   Après le départ des autorités, la cérémonie doit se terminer par des remises de gerbes au pied du monument devant les troupes au garde à vous. Mais la foule est si dense que les soldats peinent à rester immobiles tant ils sont écrasés par les spectateurs et la manifestation doit être écourtée.

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    Lors de la deuxième guerre mondiale, le mémorial est conservé malgré les craintes que les allemands ne le détruisent. Il reçoit même la visite du feld-maréchal Erwin Rommel puis celle d’Adolf Hitler, Hermann Göring et des membres du siège social du parti nazi le 2 juin 1940.

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   A proximité du monument, des tranchées reconstituées ainsi qu’une partie des souterrains ayant servi lors de la bataille peuvent être maintenant visités. Les vestiges de tranchées et les cratères laissés par les obus rappellent la violence exceptionnelle des combats.

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   En face du mémorial, une stèle a été élevée à la mémoire des morts de la division marocaine qui avait pris une première fois la crête en mai 1915 mais avait dû ensuite se replier, faute de renforts.

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   Ayant fait l’objet d’une importante restauration à partir de 2004, le mémorial est inauguré de nouveau en avril 2007, au cours d’une cérémonie marquant le 90e anniversaire de la bataille de Vimy. La reine Elisabeth II, le Premier ministre canadien Stephen Harper et son homologue français Dominique de Villepin participent à cette manifestation.

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            Un homme aurait pu participer à cette commémoration : le dernier survivant de la bataille d’avril 1917, John Babcock. Il est mort en février 2010 à l’âge de 109 ans.

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   Le mémorial de Vimy est l’un des deux seuls sites historiques situés à l’extérieur du territoire canadien à être reconnus par la Commission des lieux et monuments historiques du Canada. Il figure depuis 2012 sur les billets de banque de 20 dollars.

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   Les œuvres originales en plâtre confectionnées par Walter Allward sont aujourd’hui exposées au musée canadien de la guerre, salle de la Régénération à Ottawa, la capitale du Canada.

  Aujourd’hui encore, des jeunes Canadiens viennent régulièrement passer l’été dans le Pas-de-Calais pour servir de guides sur le mémorial.

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Il y a 100 ans à Lens

1915 : il y a 100 ans, Lens était allemand et ce, depuis octobre 1914. Un rappel en 50 images de ce qu’était Lens cette année là.

La présence des troupes allemandes dans la ville ….

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Les officiers réquisitionnent les plus belles demeures….

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Et les hommes de troupe au haras du notaire Tacquet

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Chaque jour, des concerts dans les rues de Lens….

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… et des pillages

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L’occupation des carreaux de fosses avant leur destruction

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Installation d’artilleries dans les quartiers et en ville

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La création d’un cimetière militaire route de Douai ….

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Où les morts sont amenés par dizaines chaque jour ….

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Puis vinrent les premiers bombardements de la ville

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… et dans les cités minières

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Où des soldats allemands posent fièrement avec un obus anglais

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Tandis que la guerre fait rage aux portes de la ville ….

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on assiste au triste passage en ville de prisonniers français

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En fin d’année 1915, Lens est une ville déjà bien abimée

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Et c’est malheureusement loin d’être fini !

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La fosse 15 des mines de Lens, un puits chargé d’histoires

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   La fosse no 15 de la Société des Mines de Lens ne se situe pas à Lens mais sur le territoire de Loos-en-Gohelle, un bourg au nord de Lens. La fosse est appelée fosse Saint-Maurice en l’honneur de Maurice Tilloy, un des administrateurs fondateurs  de la Compagnie.

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   C’est donc près du village de Loos (qui ne s’appellera Loos-en-Gohelle qu’en 1937) que commence le forage du puits 15 en 1905 et les premiers mineurs descendent dans les galeries deux ans plus tard. Cas unique dans la société, la fosse 15 est composée de deux puits et donc de deux chevalets. L’un de ces puits atteint 297 mètres de profondeur et l’autre 527 mètres. Elle est d’ailleurs officiellement appelée fosse 15-15 bis. À l’époque, c’est la plus moderne de toutes les fosses des compagnies minières du Nord et du Pas-de-Calais.

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   Les installations au sol sont construites sur une butte de remblai d’une hauteur de 22 mètres. Elle est reliée à la fosse 12 par une voie ferrée.

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   Au pied des chevalets est construite une cité avec les célèbres corons entourés de jardins bien entretenus.

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   Durant la première guerre mondiale, la fosse 15 se situe en plein sur la ligne de front, près de la célèbre côte 70. C’est à ses pieds qu’a lieu la ‘bataille de Loos’ en septembre 1915. Point de repère des soldats britanniques, ils surnomment la structure «Tower Bridge» en raison de sa ressemblance avec le célèbre pont de Londres.

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   La bataille de Loos constitue le volet britannique de la grande attaque alliée en Artois lancée par le général Joffre (qui ne sera maréchal que l’année suivante) simultanément avec l’offensive française principale en Champagne.

   C’est le général John French (qui s’est déjà fait remarquer pour avoir refusé de collaborer avec les troupes françaises) qui commande les troupes britanniques.

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   Le 25 septembre, les anglais font une percée dans les défenses allemandes bien que les bombardements qui devaient amoindrir les troupes allemandes aient été de faible intensité à cause d’une insuffisance de l’approvisionnement en obus.

   Six divisions participent au combat. Avant l’assaut d’infanterie, les Britanniques envoient  140 tonnes de gaz au chlore (plus connu sous le nom de gaz moutarde) en complément d’un barrage d’artillerie jugé insuffisant. C’est la première fois qu’ils utilisent cette arme chimique. Mais le vent tourne et renvoie les gaz vers les tranchées anglaises : il n’y a que sept morts mais plus de 2 600 hommes ont été touchés et mis hors de combat. Les Allemands ne compteront que 600 hommes ‘gazés’.

   75 000 fantassins britanniques s’élancent des tranchées. Une gamine de Loos, Émilienne Moreau, âgée de 17 ans, va à leur rencontre et leur donne des informations sur les positions ennemies leur permettant de les prendre à revers et de reprendre Loos. On lui donnera le surnom d’héroïne de la fosse 15 ou d’héroïne de Loos.

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   Les combats ont lieu au corps à corps dans les rues de Loos. Calfeutrés dans leur cave, les Loossois apprennent que les alliés ont remporté le village, le terril et les puits de la fosse 15.

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   Cependant la progression doit être stoppée, faute de munitions et en raison de l’arrivée tardive des renforts. Les allemands reçoivent les leurs et reprennent dès le lendemain la côte 70. Les anglais ne pourront pas entrer dans Lens lors de cette bataille et le 28 septembre devront même se replier sur leurs positions initiales, comptant dans leurs rangs au moins 15 800 morts et 34 580 blessés.

   Loos en Gohelle continuera à subir les conséquences de ce conflit. En 1916, le village est quasiment rasé. Il ne sera libéré qu’en août 1917 par l’armée canadienne.

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   De ces conflits, il reste aujourd’hui à Loos en Gohelle deux cimetières militaires. L’un, appelé ‘Loos British Cemetery’ a été ouvert par les corps canadien en avril 1917. 2850 soldats, en majorité des britanniques tués lors de la bataille de Loos, y reposent aujourd’hui.

   L’autre, le cimetière du Dud Corner rassemble environ 1 800 soldats tombés lors de la bataille de Loos. Autour du cimetière, un mémorial rend hommage aux 20 000 combattants disparus lors de cette même bataille.

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   Après cette bataille, les allemands ont eu le temps d’anéantir la fosse 15 comme les autres puits de la compagnie. Les galeries sont inondées, les berlines jetées dans les puits, les échelles et les guides des cages sont arrachés et les chevalets détruits.

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   La fosse est reconstruite dès la fin du conflit. Ses chevalets métalliques sont érigés dans le style particulier des mines de Lens d’après-guerre. Les mineurs peuvent de nouveau descendre au fond dès 1922.

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  Le 1er octobre 1937, la fosse 15 est rattachée à la fosse no 12 et cesse d’extraire. Elle n’assure plus que le service du personnel et l’aérage. Pourtant, bien après la seconde guerre, la fosse 15 et son «Tower Bridge» font toujours partie du paysage de Loos-en-Gohelle….

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… à tel point qu’ils figurent en bonne place sur les cartes postales de l’époque.

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   Après la seconde guerre mondiale, des prisonniers allemands sont affectés au fond comme mineurs. Le 21 décembre 1945, l’ingénieur Augustin Viseux et un porion ramènent 3 trois rescapés d’une taille qui s’est effondrée à 432 mètres à la fosse 15. Le bilan est lourd,  9 ouvriers prisonniers allemands ont été écrasés par l’éboulement de cette taille.

   Le puits 15 ferme définitivement en 1959 et est comblé en 1962, le puits 15 bis ne l’est que dix ans plus tard, il a entretemps servi à l’entrée d’air pour la fosse 12 puis pour la fosse 11/19. Pendant plusieurs années, les installations sont laissées à l’abandon et le site devient vite une triste friche industrielle.

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   Les installations de surface, dont les chevalements, sont détruites en 1976.

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  L’histoire de la fosse 15 se termine ainsi. Le site minier a laissé place à de nombreux équipements pour la ville : parc, collège, école, salle des fêtes. Les logements miniers ont laissé place à un habitat locatif individuel.

   Aujourd’hui, de ces puits, il ne reste que des sépultures en lieu et place de l’entrée des galeries.

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   Mais la fosse 15 des mines de Lens continuera à exister grâce au travail formidable de l’artiste Claude Dryburgh, lui-même ancien mineur qui en a réalisé une maquette faite d’allumettes.

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